- HUTU
- HUTUHUTULa population hutu est principalement concentrée au Rwanda et au Burundi où elle constitue le groupe humain le plus important (respectivement 90 p. 100 et 81,9 p. 100 de la population totale) mais aussi dans les pays voisins, Zaïre, Tanzanie et Ouganda qui servent notamment de zones de refuge lors de chaque conflit ethnique opposant tant au Rwanda qu’au Burundi des factions politiques qui utilisent l’identification ethnique comme une arme de mobilisation politique.Dans l’ethnologie classique, les Hutu sont présentés comme un peuple bantou, issu de migrations venant du Nord. Dans la tradition ethnographique et bureaucratique du XIXe siècle, ils sont décrits comme petits, négroïdes, aux membres épais et à la capacité intellectuelle peu développée. Ils sont associés à une activité d’agriculteurs qu’ils étaient censés exercer sous la domination des Tutsi qui leur imposaient un ordre politique et un système économique de type féodal par le biais de contrats matérialisés par le prêt de vaches (au Burundi, ubugabire ; au Rwanda, ubuhake ) et établissant entre eux une relation d’interdépendance hiérarchisée. La différence ethnique n’excluait pas, au Rwanda comme au Burundi, l’existence d’une langue et de systèmes de croyances communs ainsi qu’une cohabitation sociale et géographique des deux groupes. Au Rwanda, le pouvoir était confisqué par un groupe de Tutsi soumettant la population hutu à une domination sans partage. Au Burundi, au contraire, le pouvoir fut confisqué par un groupe «ni tutsi, ni hutu» (bien que vraisemblablement d’origine hutu), les ganwa (les princes du sang), qui le conservèrent jusqu’à l’indépendance et dont la seule présence vient détruire le mythe de l’opposition ethnique ancestrale des Hutu et des Tutsi.La domination coloniale vint polariser tous les enjeux sociaux sur ce dualisme identitaire hutu/tutsi en posant les jalons d’une séparation systématique des deux groupes. Ce qui n’était qu’une simple étiquette identitaire avant la colonisation, permettant à chaque personne de se situer dans les rapports sociaux très complexes et susceptibles de multiples articulations, est devenu un critère unique et non négociable de différenciation et de légitimation de l’accès au pouvoir.L’identité hutu — constituée par opposition à l’identité tutsi — va devenir un enjeu politique considérable dans la lutte pour le pouvoir étatique lorsque l’accession du Burundi et du Rwanda à l’indépendance deviendra inévitable. La multiplication des conflits sanglants à partir de 1962, la référence systématique à l’ethnicité comme mode de gestion du pouvoir ou comme modalité d’analyse des sociétés burundaise et rwandaise, la succession de «génocides sélectifs» ont imposé l’appartenance ethnique comme le seul et unique critère pertinent d’identification et d’action politique. Pire, la succession de massacres «ethniques» a imposé cette lecture des enjeux sociaux dans les deux pays au point d’en faire un élément de mobilisation et surtout de réaction fondamental y compris au sein de la population. Les modérés, c’est-à-dire ici tous ceux qui tentent de transcender cette vision dichotomique issue de la logique unique de monopolisation du pouvoir, sont alors les victimes prioritaires des groupes racistes des deux tendances qui mènent ces stratégies politiques systématiques d’exclusion.Au Rwanda, en 1957, un groupe d’anciens séminaristes rwandais hutu publiait le Manifeste des Bahutu exigeant le partage du pouvoir avec les Tutsi. Confrontés à l’intransigeance des dirigeants tutsi, ils fondèrent en 1959 le Parti du mouvement de l’émancipation hutu (Parmehutu) qui n’aura de cesse de prendre sa revanche sur la domination tutsi. L’accession, en 1961, de ce parti au pouvoir marque le début d’un pouvoir hutu qui ne cessera d’essayer de se débarrasser de la minorité tutsi, de consolider ce qu’un auteur a appelé la «république des Hutu» et de faire de l’identité hutu le critère du pouvoir et de la survie. En dépit de la libéralisation formelle du régime à partir de 1990, la monopolisation du pouvoir par une faction raciste hutu réduite contrôlant la totalité de la société à travers les organisations de parti, de jeunes et les brigades interamwe continuait à soumettre l’ensemble du pays à une idéologie et à une logique politique «ethnique». Le génocide de 1994 a illustré cette situation de racisme dirigé et de violence collective avant que le mouvement tutsi du Front patriotique rwandais (F.P.R.) opérant depuis l’Ouganda ne renverse finalement un pouvoir hutu moribond.Au Burundi, ce sont les Hutu qui systématiquement ont été victimes de massacres et de «génocides sélectifs» (1965, 1969, 1972) visant à supprimer leurs élites potentiellement dangereuses à terme pour les élites tutsi. La création d’un parti ethnique hutu, le Palipehutu (Parti de libération du peuple hutu), n’est intervenu qu’à la fin des années 1960. La déracialisation incertaine du régime burundais depuis la fin des années 1980 a été marquée par l’accession progressive des Hutu au pouvoir et notamment à la présidence de la République. L’instabilité politique du pays et le conflit rwandais continuent cependant à poser la lancinante question de la compatibilité des principes de la démocratie fondée sur le principe «un homme, une voix» et des identités différenciées érigées en instruments de lutte pour la monopolisation du pouvoir politique.ethnie du Burundi et du Rwanda. Dans chacun de ces deux pays, ils représentent entre 80 % et 85 % de la pop. Ils parlent des langues bantoues: le kirundi au Burundi et le kinyarwanda au Rwanda. Depuis l'indépendance, de sanglants conflits ont, à plusieurs reprises, opposé les Hutu et les Tutsi, tant au Rwanda qu'au Burundi. Sur ce grave sujet deux thèses s'opposent:d1./d Hutu et Tutsi ne sont pas deux ethnies distinctes, puisqu'ils parlent la même langue, mais deux classes sociales;d2./d les Hutu étaient des agriculteurs sédentaires (une minorité vivait de chasse et de cueillette); pasteurs nomades d'origine nilotique, les Tutsi se sont fixés dans la région des Grands Lacs, où ils ont soumis les Hutu et adopté leur langue.
Encyclopédie Universelle. 2012.